Du 4 au 17 mars 2019
Autant l’avouer tout de suite: notre cadence de publication a un poil ralenti. Désormais, c’est toutes les deux semaines que sera publié le compte-rendu de la vie à la Ferme de Videau, ses drames et ses merveilles. Deux semaines, ça fait plus d’événements à se remettre en tête et à résumer avec le risque de commettre un pavé indigeste, mais c’est un rythme plus supportable pour celui qui écrit, quand il démarre en parallèle sa première saison de maraîchage. Je vous assure, ça n’a rien d’une mauvaise excuse. Ces jours-ci ont vraiment été riches en événements. Il va falloir suivre, car c’est une toute autre mélodie.
Compostage obligatoire
Première semaine, nous partagions toujours notre ancien relais de chasse avec Stella, Clément et leurs trois enfants. Lesquels n’osèrent pas profiter totalement de leurs vacances en venant prêter main forte aux derniers préparatifs d’aménagement des tunnels de culture: on désherba, on pailla, j’épandais à la brouette le fumier de bovin plus ou moins composté ramené par Garonnais depuis une ferme voisine, ainsi qu’une dose non réglementaire de cendre de bois (pour la potasse). Ensuite, j’incorporais en la pulvérisant cette matière organique avec un passage de motoculteur. Mais je ne dérangeais la vie microscopique ni à l’emplacement des haricots, qui n’ont besoin de rien, ni à celui des aubergines et des choux, qui aiment le compost mûr et recevront un engrais du commerce.
Une bête histoire de joint
Laëtitia emmenait Clément à son cours de Qi gong, sa nouvelle activité du mardi, pendant que j’assistais à la première réunion de l’année pour le Comité des Fêtes de Villebramar, où on programmait de succulentes agapes. Idem à la maison: magret, crêpes et raclette. C’était encore un peu les vacances scolaire, ou pas? Clément, lui aussi maraîcher, me légua un bon paquet de graines, et j’en profitais pour relancer un semis d’oignons puisque le précédent, panaché des variétés locales de Trébons, Lescure et Aginel, avait fait long feu. Puis on revenait à nos histoires d’eau, la pompe hydraulique continuant de turbiner sur trois pattes. Armés de clés à griffe, on démontait et on remontait ce qui pouvait l’être. Mais ce n’est que le lendemain que je remarquais ce joint torique, tombé par terre. Les choses rentrèrent dans l’ordre. Quant à savoir qui, de ce joint oublié ou d’un insuffisant serrage des raccords, avait pu provoquer un appel d’air dans l’aspiration de la pompe, on pataugeait.
Le melon se prend une bâche
Je poursuivais donc l’installation de l’irrigation par goutte-à-goutte dans les tunnels. Quelques couronnes de tuyau supplémentaire et un réducteur de pression achetés, je déroulais de quoi alimenter en eau du lac les planches de melons et de courgettes dont les plants arrivaient bientôt. Le voisin Garonnais, spécialiste du melon, craignait que le sol ne se réchauffe pas assez rapidement et suggéra de remplacer la paille par de la bâche noire. J’en avais un grand morceau, que je perçais selon une astuce de maraîcher démerdard: lampe à souder et boîte de conserve. Ça prenait forme. Le week-end, Laëtitia s’absenta deux jours à Agen, bien inspirée d’avoir répondu à l’invitation du salon Femmes Sages Femmes pour y proposer ses massages Amma assis, et je faisais des mondanités chez des voisins anglophones. Michael et son frère John promirent de venir visiter la ferme, et le firent.
Silence, ça pousse-pousse
À cette occasion, je repérais les deux premières asperges de l’année, sous la bâche d’occultation qui les avait protégées depuis le mois de novembre. C’était chouette, mais je retournais aussitôt à mon bureau car j’avais une commande d’illustrations à satisfaire. Et si une autre de mes illustrations, réalisée pour ce blog, intéressait un éditeur, j’en demandais apparemment trop cher. Puis, je cherchais des caisses et une brouette de récolte à prix cassé, des plants de pomme de terre, de nouveaux outils pour le motoculteur, je créais un nouveau flyer pour Laëtitia qui songeait à se délocaliser à Feugarolles, près d’Agen, une fois par semaine, démarchait les EPAD et étudiait un devis d’assurance pro pour nous deux. Enfin, côté courrier, nous recevions un lot de toiles hors-sol pré-percées pour pailler les légumes, un pousse-pousse tout neuf pour biner les cultures, et un abonnement à la revue le Citron pour mon anniversaire!
Le retour des affreux
On m’avait dit que nos coteaux argilo-calcaires convenaient à l’ail, je caressais cette idée en poussant mon nouvel engin de désherbage et en constatant qu’en effet, il se portait à merveille. Et puis je maniais la grelinette dans les tunnels car le sous-sol me parût, contre toute attente, tassé. Je suais à grosses gouttes, sous ce chapiteau de cirque. J’assemblais des planches de récup’ en guise de jauge pour quelques arbustes qu’on planterait définitivement à l’automne. Je semais dans des alvéoles les fleurs qui prendraient place au début des planches ou entre les légumes: capucine, souci, tagète, phacélie, cosmos. Et en pleine terre, au nord de la maison, des belles de nuit. Laëtitia poursuivait la mission de paillage entres les tunnels, et endossait le pulvérisateur parce qu’avec cet hiver doux, le retour des affreux était avancé: la chenille de la pyrale du buis pullulait déjà.
Allegro, ma non troppo
Je t’avais prévenu, lecteur, que ce résumé risquait d’être indigeste. Mais c’est à un tout autre rythme que se sont enchaînées les activités ces temps-ci, très différent de celui de nos laborieux chantiers de rénovation de 2018, un rythme plus difficile à mettre en musique. Jusque-là moderato, ça tournait allegro avec la réception des plants de courgettes en fin de semaine. Et pour finir, je rendais visite à Benjamin avec notre groupe de maraîchers bio petite surface. Là aussi, signes visibles d’une activité créatrice trépidante, avec chaque jour un truc nouveau: nouveau motif de satisfaction… ou nouveau sujet d’inquiétude. Mais le résultat, vu de l’extérieur, est indéniablement bluffant. On espère très fort, concernant notre propre histoire, que l’effet produit est le même.