Semaine du 24 au 30 septembre 2018
Encore une vacancière à la ferme de Videau, avec le séjour de Clémence du dimanche au vendredi. Elle se révéla d’une efficacité extrême en matière d’onction d’huile de lin sur les planches de rive neuves de la grange. Il fallut d’abord achever de patiemment monter un échafaudage, resté infirme à cause d’un jeu incomplet de pièces dans sa boîte, qu’un service après-vente paresseux venait tout juste de compléter par courrier. Puis il fut question de désherbage, de récolte de tomates et de chargement à destination de la déchetterie. Pas rancunière, Clémence nous régala d’un frichti de légumes du soleil et de tartes aux pommes et aux noix. Je l’arrosai d’arquebuse, le digestif de papa à 60%. L’efficacité de Clémence chuta notablement, mais le plus gros était fait, et ses vacances d’infirmière bien employées.
Un filet sur la Toile
Le bruissement de ces activités me parvint depuis la fenêtre du bureau, puisque je consacrai le début de la semaine à la réalisation du site Internet d’un fabricant d’instruments de musique zen. Cette double activité sur la Toile, c’est le filet de sécurité de notre projet, qui met du beurre dans des épinards pas encore récoltés, ni même semés. Mardi je laissais tout en plan pour me rendre chez Garonnais, maraîcher à la retraite de son état et premier bienfaiteur de notre projet, faire emplette de quelques 150 piquets métalliques. Ces supports, vrillés dans le sol, recevront les arceaux métalliques qui sont l’ossature des tunnels de culture, ou serres. Tout ce matériel, et plus encore, n’attend que la reprise dans cette ferme voisine. Son heure aura sonné avant la saison prochaine. Quand je fus lassé de l’écran, je sortis enfin, histoire de biner pour la première fois nos poireaux, et vérifier leur irrigation par goutte à goutte.
Des tunnels pour Menton
Garonnais reparut mercredi, l’ombre de son fidèle destrier de 70 chevaux se découpant dans le soleil de midi. Équipé comme convenu d’un outil à dents recourbées destiné à travailler la terre à l’emplacement des futurs tunnels de culture. Suite à ce pseudo-labour, j’entrepris de délimiter l’emplacement des tunnels au décamètre, et commençais à planter les piquets à l’aide d’une tarière thermique pétaradante. Puis je rendais visite à Jacques Barroux, un maraîcher de Razimet, rencontré par hasard pendant mon séminaire de dessin. Je visitais son épatant jardin, dont le bocage avait en 40 ans prospéré sur le désert d’un immense champ de céréales. Seulement équipé d’un rotovator et d’un broyeur, Jacques cultive de nombreux légumes au milieu de haies de pêchers et de vignes. Devant sa maison s’élèvent grenadiers, plaqueminiers, noisetiers, kiwis. Au marché de Tonneins où il se rend deux fois par semaine, on s’arrache les citrons de Menton qu’il élève sous abri. Jacques invoque Dominique Soltner, dont il a tous les bouquins. Je fis le plein de recommandations et achevais la journée à une rencontre de jeunes et moins jeunes agriculteurs organisée par l’ADEAR 47 sur le thème «autonomie sur la ferme».
Péril rouge et engrais vert
Le lendemain, je repris l’installation des piquets. J’étais devenu un as, mais encore une fois, je laissai tout en plan pour cause de visite inopinée du contrôleur Ecocert, flanqué de son stagiaire. Pour ne rien vous cacher, j’étais dans l’embarras à cause d’un semis de luzerne non certifiée bio que je n’avais pas signalé. Il passa l’éponge, car même la semence conventionnelle, pourvue qu’elle soit non-traitée, est tolérée en engrais vert. Mon visiteur, que nous appellerons Michel, évoqua un ancien contrôle chez un maraîcher du coin, lequel avait ensuite adressé un courrier vengeur à l’organisme certificateur disant qu’il «préférait vivre en Corée du Nord que d’être contrôlé par Michel». Marrant, pourvu qu’on échappe au goulag.
Un week-end recommandé
Toujours au chapitre règlements de compte, nous recevions la visite d’un charpentier, venu bien aimablement constater d’éventuels défauts dans la rénovation de la toiture de la grange. On nous avait averti que la chose laissait à désirer, et le chantier d’isolation se trouvait à nouveau au point mort. Cette fois ci, nous en avions le cœur net: le professionnel repéra de nombreuses malfaçons! Peu après, nous avons envoyé une lettre recommandée à l’entreprise qui a réalisé les travaux. Une histoire à suivre. Et encore du retard sur l’aménagement du gîte, hélas.
Presque blasés par tant d’aléas, nous caressions la perspective de nous changer les idées avec l’arrivée pour le week-end de Rosa-Maria, Alexandre et leur fille Anaé. Ce furent deux jours de break bienvenus, tant pour les discussions passionnées que pour la réussite du barbecue («une andouillette grosse comme le bras»). Alexandre nous gratifia de quelques dizaine de gigas de vues aériennes de la ferme grâce à son drone. En prenant de la hauteur, on arrivera certainement à bien démarrer la semaine.